PANIQUE EN CUISINE

La scène : Dans A Vif ! de John Wells (2015), Bradley Cooper campe une star de la cuisine, chef d’un grand restaurant londonien à la conquête d’une troisième étoile au Guide Michelin. À chaque déjeuner ou diner, au moment du coup de feu, il hurle sur les commis et touche compulsivement tout ce qu’ils préparent pour goûter et rectifier les plats, au point que la cuisine finit par ressembler à un grand champ de bataille (la scène est visible ici).

Le mensonge : Au cinéma, les cuisines de palaces ressemblent souvent à des arènes désordonnées (Le Goût de la vie, Ratatouille), un peu comme dans un épisode de l’émission télé Cauchemar en cuisine. C’est bon pour le suspense et la tension dramatique, mais la réalité est moins épique, d’après le chef Michael Chernow interrogé dans cette vidéo : « Ça me semble un peu trop chaotique. Les cuisines d’un établissement de cette stature sont hyper organisées. C’est sûr qu’il y a des moments intenses, mais c’est exagéré ici. » D’après lui, si le chef d’un grand restaurant garde toujours un œil sur l’ensemble des plats, il est rare qu’il intervienne lui-même dessus en poussant tout le monde – il donne plutôt des ordres. Autre détail aberrant : personne ne goûte un plat avec son doigt, à la volée. Dans une cuisine gastronomique, chacun a sa propre cuillère de dégustation dans sa poche.

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LA RATATOUILLE EST MINIMALISTE

La scène : Dans Ratatouille de Brad Bird (2007), un rat nommé Rémy, fin gourmet au palais affûté, aide un apprenti cuisinier maladroit à se faire passer pour un as des fourneaux. A la fin du film, l’apprenti conquiert le cœur d’un redoutable critique culinaire avec un plat présenté comme une ratatouille (la scène est ici).

Le mensonge : Les Provençaux ont dû avoir des sueurs froides en voyant ce Pixar. Présenté comme une ratatouille, plat typique du Sud de la France composé de tomates, aubergines, courgettes et poivrons (Marmiton pour preuve), le plat présenté par Rémi a provoqué des débats houleux chez les professionnels. Pour Grant Crilly, de la chaîne Youtube ChefSteps, cette recette est en fait celle du « confit byaldi », plat inventé par le chef Français Michel Guérard, et proposé par Thomas Keller, conseiller culinaire du film. Quant au site de cuisine français 750 grammes, bible de tous les amateurs de cuisine, il considère qu’il s'agit… d'un tian provençal. Pourquoi ce mensonge ? Probablement parce que comme n’importe quel Français chauvin le sait, une vraie ratatouille, proche de la bouillie, a nettement moins d’allure que le plat très esthétique et raffiné de Rémy. La prochaine fois, merci de potasser les livres d’Alain Ducasse avant de toucher à notre gastronomie nationale, Hollywood.

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LE CUISTOT CE HÉROS

La scène : Dans #Chef de et avec Jon Favreau (2014), le réalisateur interprète un chef cuisinier qui préfère démissionner de l’établissement qui l’emploie plutôt que de compromettre sa vision de la cuisine. Il décide d’ouvrir un food truck à Miami avec son ex-femme et son fils. Lors d’une séquence spectaculaire, il découpe une carcasse de viande entière à l’aide d’un petit couteau, tout seul, dans sa cuisine. La bande-annonce est visible ici.

Le mensonge : Dans le film, le chef est décrit comme un être tout-puissant, charismatique et doté de mille talents - un vrai héros de cinéma, en somme. Mais en réalité, les cuisiniers ne maitrisent généralement pas la technique de la découpe de viande. Pour les spécialistes culinaires interrogés dans cette vidéo, dépecer un cochon entier avec l’adresse d’un chirurgien ne relève pas des compétences d’un cuisinier : « Quelqu’un d’autre fait ça pour lui ! Maîtriser l’anatomie d’un cochon requiert bien plus de connaissances… » Les chefs interrogés reconnaissent qu’ils ne sauraient pas eux-mêmes comment découper une tête de cochon. Les scénaristes d’Hollywood n’ont pas dû assez regarder Top Chef.

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MOURIR DE TROP MANGER

La scène : On ne présente plus La Grande Bouffe (1973), film culte de Marco Ferreri qui fit scandale à sa sortie et provoqua l’indignation des spectateurs au Festival de Cannes. Dans cette satire féroce du consumérisme bourgeois, quatre amis s’enferment le temps d’un week-end pour s’adonner à un « séminaire gastronomique », décidés à manger jusqu’à ce mort s’en suive – ce qui finit par arriver au personnage joué par Michel Piccoli dans cette scène.

Le mensonge : L’agonie par excès de gloutonnerie ? Le cinéma a souvent eu recours à ce mythe effrayant et spectaculaire - on pense à Seven de David Fincher et son fameux péché de gourmandise puni par le serial killer John Doe. Que les foodies soient rassurés, l’estomac a peu de risques d’éclater. « Même si cela est déjà arrivé par le passé, les chances sont tout de même infimes, car il s’agit d’un organe bien plus musclé que n’importe quel autre segment de l’intestin. Celui-ci, très résistant, est taillé pour faire face à de gros repas. Au cours d’un repas, la capacité d’un estomac moyen peut augmenter d’un litre, mais davantage n’est pas chose rare. » lit-on dans cet article de Science Post. Mais le cinéma a toujours aimé lier les plaisirs de la vie et le risque de mort pour faire frissonner ses spectateurs, fidèle au bon vieux mythe d’Eros et Thanatos.

Où voir ce film ? Il est disponible sur la Cinetek

Par la rédaction de TroisCouleurs

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